L’ESPACE d’art contemporain André Malraux de Colmar accueille, jusqu’en février 2003, Corpus 5, la nouvelle exposition du collectif d’artistes bijoutiers Corpus, riche d’objets aussi précieux qu’insolites. Y a-t-il de l’innommable dans le bijou contemporain, s’interrogent les 13 artistes bijoutiers du collectif Corpus et leurs sept invités au fil de l’exposition Corpus 5, ouverte depuis quelques jours à l’Espace d’art contemporain André Malraux, à Colmar.
Fruits des quêtes individuelles de chacun des artistes sur la limite de l’individu comme définition de l’innommable, de précieux bijoux intriguent dans leur écrin en forme de cube : oeufs en métal de Françoise et Claude Chavent, « d’où s’échappera peut-être un bijou s’ils tombent et se cassent », suggère Olivier Daunay, président de l’association Corpus ; coiffe et tige de bois gracile en hommage à trois femmes, de Claire Direz ; traces de Christophe Burger sur des pièces rondes et plates ; délicates suspensions de métal découpé de Sibylle Kirsch, qui présente un travail sur le plein et sur le vide.
Endroit/envers
Parce qu’il affirme qu’il faut tout dire d’une personne si on veut la bien nommer, Joël Faivre-Chalon présente un collier et un bracelet en métal dont les faces couvertes de lettres dévoilent leur secret : d’innombrables noms à retrouver. Chez la plupart des artistes, le propos se brouille : endroit/envers, montré/caché, de quel côté se situe la limite ? Ainsi l’installation d’Astrid Meyer. Le visiteur est invité à plonger la main dans un cube à l’intérieur duquel il doit empoigner une pierre. Les bagues présentées derrière le cube reproduisent le même geste de poing refermé sur un caillou poli. La pierre de la bague, portée comme si elle était retournée à l’intérieur de la main, est collée à la paume ; ne reste visible sur la main que l’anneau, superbement décliné. Ou encore les « cheminées » de Brune Boyer. De la vitre du cube, on distingue un petit objet mystérieux émergeant d’une toile tendue. D’une petite ouverture percée sur une autre face du cube, on découvre sous la toile… (surprise).
Peut-on encore parler de bijoux pour qualifier ces objets aussi précieux qu’insolites ? « Le bijou n’existe en tant que tel que s’il est associé à la personne qui le possède. Sinon, c’est un bel objet », répond Olivier Daunay.
Pour réaliser ces oeuvres, les artistes du collectif ont travaillé avec le psychanalyste Christian Jeanclaude afin de mieux cerner la notion d’innommable. Nabil Fares, un de ses confrères, sera d’ailleurs présent le dernier jour de l’exposition pour présenter un travail sur les mots. Le projet Corpus 5 comprend également l’intervention des membres de l’association dans les ateliers d’art plastiques de la Ville. Après Colmar, Corpus 5 prendra le chemin de la Hongrie, de l’Autriche, de la Belgique, puis de Strasbourg.
Des installations surprenantes à l’espace Malraux de Colmar.
Dominique Poirier